Les récentes évolutions de la régulation en matière de finance durable en Europe démontrent un renforcement des exigences pour les entreprises et les institutions financières.
Voici les principales actualités :
1. Directive sur le devoir de vigilance des entreprises (CSDDD)
La Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CSDDD), adoptée en mai 2024, impose aux grandes entreprises de l’UE (celles ayant plus de 1 000 employés et un chiffre d’affaires de plus de 450 millions d’euros) de mener des diligences raisonnables sur leurs chaînes de valeur pour identifier et atténuer les impacts environnementaux et humains. Cette directive introduit des obligations de transparence et de responsabilité dans les chaînes d’approvisionnement, avec des délais de conformité graduels selon la taille des entreprises. Cependant, elle exclut en grande partie les PME et certains secteurs clés comme la finance, ce qui soulève des critiques(Plan A)(HRW).
Plus précisement, la Corporate Sustainability Due Diligence Directive (CSDDD) impose des exigences aux grandes entreprises en matière de responsabilité sur les impacts environnementaux et sociaux de leurs chaînes de valeur, notamment :
- de cartographier leurs chaînes d’approvisionnement,
- de mener des évaluations de risques pour identifier les impacts négatifs et
- de mettre en œuvre des mesures pour les éviter.
La directive s’applique aux entreprises européennes et à celles opérant dans l’UE, y compris certaines filiales de multinationales non européennes.
Le champ d’application de cette directive a été réduit au cours des négociations, limitant ainsi son impact aux plus grandes entreprises (environ 5 400 selon certaines estimations)(Plan A)(HRW).
Les entreprises doivent également établir des plans de transition climatique, mais il n’existe pas de sanctions spécifiques si elles ne respectent pas les objectifs de réduction des émissions.
2. Révision du SFDR (Sustainable Finance Disclosure Regulation)
Le SFDR, qui régule les divulgations en matière de durabilité dans les produits financiers, fait l’objet d’une révision en 2024. Les autorités de surveillance européennes (EBA, ESMA, EIOPA) ont proposé des améliorations pour clarifier les catégories de produits financiers et réduire le risque de greenwashing.
Cette révision vise à rendre les divulgations plus transparentes et accessibles pour les consommateurs et à introduire un indicateur de durabilité pour évaluer les produits financiers. Ces mesures sont conçues pour simplifier la classification des fonds et renforcer la confiance dans les produits dits “durables”(EIOPA)(Linklaters).
La révision du SFDR vise à simplifier et clarifier les informations fournies par les gestionnaires de fonds et les institutions financières sur leurs produits dits « durables ». En raison des critiques liées à l’usage ambigu des catégories d’investissements (notamment les fonds articles 8 et 9), les autorités de régulation européennes ont proposé la création de deux catégories claires : “sustainable” et “transition”. Ces changements sont destinés à réduire les risques de greenwashing en simplifiant les exigences de divulgation et en rendant plus transparentes les informations pour les consommateurs(EIOPA).
Par ailleurs, des propositions pour un indicateur de durabilité sur les produits financiers ont été formulées, permettant aux investisseurs de mieux évaluer les fonds et produits d’assurance dans une perspective ESG (Environnement, Social et Gouvernance) (Linklaters).
3. Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (CBAM)
Le CBAM, entré en vigueur en 2023, introduit une taxe carbone pour les importations de certains produits à forte intensité de carbone (comme l’acier, le ciment, et l’aluminium) afin d’éviter les fuites de carbone vers des pays moins stricts en termes d’émissions. Cette mesure fait partie de la stratégie “Fit for 55” de l’UE, qui vise à réduire les émissions de 55 % d’ici 2030. Le CBAM est actuellement en phase de transition, avec une mise en œuvre complète prévue pour 2026 (Plan A).
Plus spécifiquement, le CBAM (Carbon Border Adjustment Mechanism) est un mécanisme innovant destiné à aligner les prix du carbone entre les produits importés et ceux fabriqués dans l’UE, afin d’éviter les fuites de carbone (c’est-à-dire la délocalisation de la production vers des pays où les normes d’émissions sont moins strictes). Entré en vigueur en 2023, il impose aux importateurs de certains produits à forte intensité de carbone (comme l’acier, le ciment, l’aluminium, etc.) de payer des certificats en fonction de l’empreinte carbone de leurs produits.
La phase de transition s’étend de 2023 à 2025, avec une mise en application complète prévue pour 2026, où les entreprises devront acheter des certificats pour chaque tonne de CO2 émise par leurs importations (Plan A)(Linklaters). Le CBAM s’inscrit dans la stratégie plus large du Green Deal européen visant à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
4. Règlement sur les obligations vertes européennes (Green Bond Standard)
En 2024, l’UE a adopté le règlement sur les obligations vertes qui établit des normes claires pour les émissions d’obligations respectant les objectifs environnementaux de l’UE. Ce règlement vise à assurer que les obligations qui se revendiquent “vertes” respectent des critères stricts, réduisant ainsi le risque de greenwashing et facilitant la levée de fonds pour des projets réellement durables(Europa.eu).
En effet, le Green Bond Standard (GBS) de l’UE vise à établir une norme unique et robuste pour l’émission d’obligations vertes dans l’UE, permettant aux investisseurs de distinguer les obligations réellement alignées avec les objectifs de durabilité européens. Le règlement impose que les projets financés par ces obligations soient conformes à la Taxonomie verte européenne, garantissant ainsi une transparence et une traçabilité accrues.
Ce règlement devrait améliorer la confiance des investisseurs en limitant les pratiques de greenwashing dans le marché des obligations vertes, qui a explosé au cours des dernières années avec une demande croissante pour des investissements alignés sur les objectifs climatiques de l’UE(Europa.eu)(Plan A).
Ces mesures renforcent la régulation européenne pour soutenir une finance durable plus crédible et transparente, en évitant les dérives de greenwashing tout en favorisant la transition écologique des entreprises.